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Zoyek
le cher pays de mon enfance, entre Schlipak et Elibed.
jeudi 14 décembre 2006, par
Que l’on vienne de Mliuej, de Valtordu, d’Alaykjdu ou de Boulgourville, Zoyek est le dernier village-étape avant d’arriver à Glargh. Quand on s’arrête à Zoyek, le fleuve Elibed est en vue et on sait que l’orgueilleuse cité des clercs et des mages n’est plus très loin. C’est souvent une dernière occasion de faire la fête avant d’arriver au but de son voyage. L’animation nocturne étonne d’ailleurs beaucoup les voyageurs qui y viennent pour la première fois, tant ce fief des elfes noirs est plus connu pour sa léproserie que pour ses troquets. Il n’en faut pas beaucoup au bon peuple pour prendre peur. Mais ça va changer.
Historique
A l’origine, Zoyek était un thorp, un village d’elfes noirs [1]. Calme, idéalement situé entre la forêt de Schlipak et le fleuve Elibed, au bord d’un petit ruisseau, c’était l’endroit rêvé pour établir un campement, puis pour construire en dur. Pour le plaisir de voir les faces empourprées de rage des elfes sylvains, les fondateurs du village bâtirent leurs maisons en pierre (comme de vulgaires nains, disent les elfes), et n’hésitèrent pas à abattre quelques arbres pour faire les poutres [2]. Si bien qu’il leur fallut vite un mur d’enceinte, pour isoler Zoyek des flèches tirées chaque jour par des archers furieux. La fureur finit par se calmer, mais le mur demeura.
La présence de ce mur côté forêt explique que la ville se soit développée côté fleuve. Avec l’essor d’Alaykjdu et la construction de la route, des voyageurs de plus en plus nombreux firent étape à Zoyek. Certains commencèrent même à s’installer. Cependant, au fil des coups d’état, des invasions et des tyrans qui exercèrent tour à tour leur autorité sur la région, la ville ne rendit jamais de comptes à personne. Le chef de village se renomma "bourgmestre" pour faire plus sérieux, et fut élu par l’ensemble des habitants de la ville et non plus seulement par la communauté drow. Zoyek fut ainsi la première ville de la terre de Fangh à accorder aux femmes en général le droit de vote que les elfes noires avaient de toute façon depuis toujours [3]. D’un autre côté, la seule élection étant celle du bourgmestre et celui-ci étant toujours un elfe noir, ça donne une élection par siècle en moyenne, et donc pas mal de citoyen(ne)s qui ne vivent pas assez longtemps pour déposer un jour leur bulletin dans l’urne.
Plus d’une fois des émissaires, notamment menzzoriens, tentèrent de venir collecter des taxes. Parier sur la façon dont le bourgmestre les mettrait en fuite ne tarda pas à devenir un loisir populaire. Et des façons, il y en avait : la plupart des sorts actuellement utilisés pour faire fuir les belles-mères [4] ont été créés pour se débarrasser du collecteur d’impôts de Zoyek. Au bout d’un certain temps, la ville fut déclarée zone franche et on n’en parla plus.
Comme tout le monde, les habitants de Zoyek étaient confrontés au problème des lépreux, et comme partout, la solution consista à leur construire de jolies petites maisons là où personne ne voulait vivre. Dans le cas présent, derrière le mur, côté forêt. C’est en voyant cette plaine inhabitée ou presque que Marx Saint-Fiacre, médecin philanthrope par ailleurs fondateur de l’association qui porte son nom [5], décida d’y installer un grand dispensaire. Les premiers à en bénéficier furent bien entendu les lépreux qui habitaient à côté, et à mesure que l’information se répandait, des lépreux se mirent à affluer de toute la terre de Fangh pour bénéficier des soins du Marx Dispensaire. C’est ainsi que la léproserie de Zoyek devint la plus importante du continent. Il fut des époques où elle comptait plus d’habitants que la ville elle-même.
Zoyek aujourd’hui
Le passage incessant des voyageurs fait de Zoyek une ville étonnamment animée pour sa petite taille. On estime qu’il n’y a guère plus de 400 habitants permanents, dont la moitié sont des elfes noirs. Cependant, quand vient le soir, il n’est pas rare que la population grimpe pour la nuit à 2000 personnes et plus. En toute logique, toute l’économie de la ville repose sur ces gens de passage. Il y a près d’une auberge pour dix habitants et la bière de Mliuej arrive par le fleuve pour alimenter les nombreuses tavernes (bien qu’on boive aussi beaucoup de bière de Glargh, qui vient de moins loin). A l’aube, les ménestrels ivres morts se ramassent à la pelle. Et pour fêter son élection (à vie), Jwéholo Thorp, l’actuel bourgmestre, a fait construire un théâtre, qui complète la palette de divertissements depuis maintenant une cinquantaine d’années. Il y a quelque part un gars qui écrit depuis des années des poèmes, des romans et des comédies sur le même thème, "c’est beau Zoyek la nuit". Il n’a jamais reversé le moindre sou à la municipalité, ce rat.
Par tradition, les elfes noirs envoient généralement leurs enfants étudier l’économie ou la magie dans la ville de Glargh toute proche (ou parfois ici, à l’Université Donjonnique de Sorcellerie). Ils laissent les métiers de l’hôtellerie au reste de la population pour mieux se consacrer au commerce, à l’administration ou à la protection de la ville. Contrairement aux autres habitants, ils emploient volontiers des ogres comme personnel de maison : on trouve toujours un magicien dans la famille pour lancer de temps à autre un sort de Multiplication des Pains [6]. Ainsi, l’ogre bien nourri n’est pas tenté de manger les enfants. C’est également un elfe noir qui a inventé la chopek, une chope de bière à la forme ovoïde, pour que la ville ait un produit d’artisanat typique à vendre aux voyageurs. On n’aurait pas parié un kopek sur la chopek de Zoyek, mais les faits sont là : l’atelier de souffleurs de verre tourne toujours à plein.
Quant à la léproserie, elle a perdu de son importance depuis qu’on sait guérir la lèpre. Au lieu de vivre longtemps avec leur maladie grâce aux attentions des médecins du Marx Dispensaire, les lépreux ne restent plus qu’un an ou deux avant de pouvoir rentrer chez eux, guéris. Tout cela a spectaculairement diminué leur nombre, et du même coup, leur visibilité quand ils descendent en ville. C’est meilleur pour le commerce.
Dire qu’il y a des naïfs qui croient que c’est par bonté d’âme que la ville de Zoyek a massivement financé la recherche médicale.
Tout cela me fait penser qu’il y a bien longtemps que je ne suis pas allée voir mes parents, moi.
Nak’hua Thorp
[1] Petit rappel pour les deux que je vois roupiller à côté du brasero au fond de la salle : "thorp" signifie "village" en langue drow et c’est précisément l’origine de mon nom de famille.
[2] Les elfes sylvains ne coupent pas plus d’une branche à chaque arbre quand ils ont besoin de bois, et avant de prendre la scie, ils passent une journée à s’excuser auprès de l’arbre pour le mal qu’ils vont lui faire.
[3] Attirant de nombreuses femmes de tête, ce qui explique pourquoi les femmes de Zoyek ont la réputation d’avoir du caractère.
[4] Si le sujet vous intéresse, je vous recommande l’excellent ouvrage 1200 sorts contre les belles-mères de ma collègue Aestebanzia Tao.
[5] Bien qu’en général, on dise "MSF" pour abréger.
[6] On dit "pains", mais c’est le genre de sort qu’il vaut mieux lancer sur des jambonneaux quand on a un ogre à nourrir.